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Soie, d'Alessandro Baricco
Entre la Provence et le Japon, il y a dans les années 1860 environ six mois de voyage, à pieds, à dos de cheval, en train, en navire… La description seule de cette expédition
qu’Hervé Joncour, personnage principale de l’œuvre, va boucler quatre fois, pourrait nourrir des centaines de pages de rebondissements, de moments de doute, de peurs, de découvertes incroyables. Pourtant Baricco n’y consacre que quelques lignes, répétées inlassablement :
« Il parcourut à cheval deux mille kilomètres de steppe russe, franchit les monts Oural, entra en Sibérie, voyagea pendant quarante jours avant d’atteindre le lac Baïkal, que les gens de l’endroit appelaient : mer. Il redescendit le cours du fleuve Amour, longeant la frontière chinoise jusqu’à l’Océan, et quand il fut à l’Océan, resta onze jours dans le port de Sabirk en attendant qu’un navire de contrebandiers hollandais l’amène à Capo Teraya, sur la côte ouest du Japon. […] »
Clairement ce n’est pas l’odyssée d’Hervé Joncour qui nous intéresse, mais son aventure intérieure. Celle-ci se retrouve complètement polarisée entre deux espaces
qui s’affrontent de bien des manières : deux pays oú tout est différent, deux langues, deux femmes, une année coupée en deux périodes de six mois, le monde du réel et
celui de l’idéal. Cette dualité semble mettre en évidence comme deux personnalités du héros : lui qui a passé la plupart de sa vie à « contemple[r son] destin à la façon dont la plupart des autres contemplent une journée de pluie » , aspire à travers ses voyages et un profond chamboulement intérieur à enfin en devenir l’acteur.
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